“Regarde dans le dictionnaire !” “Va vérifier dans “Tout l’univers”…” Avant l’arrivée de Google, les enfants entendaient ces phrases dès qu’ils posaient une question. Par la suite, le fameux “Google est ton ami” est devenu la réponse préférée des ados un brin moqueurs.
Et maintenant ? “Dis Siri ?” “Salut GPT ?”
Vous entendez de plus en plus parler de GEO qui remplacerait le SEO. Mais pourquoi ? Est-ce parce que la technologie est là ? Ou est-ce parce que les utilisateurs trouvent plus facile de poser une question à ChatGPT que de taper une requête sur Google ?
Gagner du temps a toujours été la vraie intention !
Hier, pour savoir ce que représentait le 14 juillet, il fallait taper cette requête dans Google :

Au tout début, nous n’avions que des liens. Et devions aller sur les sites. Peu à peu, avec les rich snippets, les moteurs de recherche ont commencé à donner directement les réponses aux internautes sans passer par des sites tiers.
Cela avait d’ailleurs donné des sueurs froides aux éditeurs de sites et experts SEO, car, si la réponse est déjà proposée sur Google, il n’y a plus de clic et de visites ! Pourtant, le choix de Google est tout à fait logique : son objectif est de satisfaire ses propres clients. Et les internautes n’ont jamais souhaité lire des pages web à l’infini. Ils voulaient des réponses à leurs problèmes.
- Quel restaurant est ouvert près de chez moi ?
- Quand est la rentrée scolaire ?
- Peut-on mélanger javel et vinaigre blanc ? (Surtout pas, la réaction chimique peut vous tuer !)
Google proposait même des calculateurs ou des résultats de calcul dans ses Serps, plutôt que de devoir faire cliquer l’internaute vers un site où il aurait à remplir des champs. Et là, aussi, c’est aussi normal que logique : une logique élémentaire en marketing.
Limiter les étapes de conversion et de satisfaction client.
Nous le savions donc depuis longtemps : l’humain veut tout, tout de suite. Qui peut le blâmer de préférer une réponse GPT complète et construite, plutôt que de devoir lire un ou plusieurs articles pour obtenir une réponse qui lui convient ?
Contrairement au rich snippet de Google, GPT comprend immédiatement qu’il s’agit d’une demande plus profonde et balaie les deux principales informations à retenir.
Mais il fait mieux que ça : il permet de rebondir dans le fil de discussion et de creuser la réflexion !
Le moteur comme espace de raisonnement
Contrairement à un LLM, Google ne se souvient pas de ce que vous avez demandé précédemment (il a un historique rattaché à votre session, certes, mais pas avec la même granularité qu’un LLM). Il ne fait aucun lien entre vos deux questions. Vous pouvez tout à fait lui demander ce qu’est le 14 juillet, puis l’interroger sur ce qu’il se serait passé sans la prise de la Bastille. Il ne saura ni vous répondre, ni vous permettre d’explorer intellectuellement ces idées.

À dire vrai, il ne comprend tellement pas l’intention de réflexion (oui, oui, de réflexion) qu’il envisage de la reformuler. Certes, nous voyons bien qu’avec cet exemple il propose des PAA ou des liens qui pourraient répondre d’une certaine façon en explorant les conséquences réelles.
Mais Google n’est capable d’aucun raisonnement créatif. Ce qu’un LLM, toutes proportions gardées, peut :

Cette simple différence est capitale pour l’être humain : car au-delà d’avoir immédiatement la satisfaction de son besoin, il a désormais la possibilité d’itérer en direct pour explorer des concepts.
On a longtemps cru que Google représentait le sommet de l’efficacité informationnelle. En quelques secondes, une liste de résultats hiérarchisés, une promesse d’exhaustivité et de pertinence. Mais depuis l’essor des IA génératives, ce modèle montre ses limites. Non pas en termes de qualité, mais en termes de rapport au savoir.
Avec ChatGPT ou Perplexity, le processus n’est plus linéaire. Il devient dialogique. L’utilisateur pose une question, puis une autre, affine, revient en arrière, teste une hypothèse. Ce n’est plus une recherche, mais une conversation avec un moteur. Et cette forme change tout.
Car, désormais, les LLMs sont des outils de création, d’idéation. Bien plus que de simples outils de consommation d’information. Et si de nombreux articles s’alarment sur l’appauvrissement cognitif lié à ces nouveaux usages, force est pourtant de constater que, contrairement à Google et autres moteurs, ils libèrent au contraire du temps pour explorer de nouvelles idées.
Gain de temps… mais à quel prix ?
Oui, ces outils sont en train de transformer, irréversiblement, le monde.
Cela change la donne pour les éditeurs de sites côté production de contenu. Pour le monde SEO. Pour les créateurs graphiques et textuels, pour les enseignants et recruteurs (au travers des devoirs et lettres de motivations rédigées par IA), pour les employeurs, également dans de nombreux secteurs.
Combien d’utilisateurs se servent de ces outils pour faire leur programme de diète ou de sortie pédagogique ? Combien de cabinets d’analyse licencient à tour de bras maintenant qu’on peut faire des études de marché grâce à l’IA (lire un article de 01Net datant de 2017 sur “l’embauche” d’une IA au sein de la boîte) ?
Mais si tout le monde pointe du doigt le vol supposé des contenus, l’appauvrissement de la capacité de réflexion et d’exécution humaine, il y a une question pourtant essentielle déjà existante à l’époque de l’hégémonie Google qui est évacuée : vendons-nous notre confiance ?
Lorsque vous demandez à une IA une réponse, vous supposez qu’elle ne se trompera pas. N’inventera pas des références inexistantes ou ne fera pas de contresens. Si les médias pointent du doigt ce phénomène de mensonges et trahisons (lire l’article de National Geographic à ce sujet), ils semblent oublier que ce problème existait déjà bien avant :
Par essence, le SEO supposait de “truquer le jeu” pour pousser à une meilleure hiérarchisation de l’information. La course à la réponse était biaisée. Ce n’était pas le vrai qui pouvait surplomber le reste, c’était le plus performant algorithmiquement. Ce qu’il se passe actuellement sur Google Discover en est d’ailleurs la preuve :
Suite aux nombreuses manipulations de Discover et la prolifération des fake news, Google réagit. Non pas en évitant la publication de ces informations, mais en cassant l’effet de clic.
Le résultat ? En clic ou en résumé IA, la fake news de “La nouvelle loi qui taxe [proposition absurde]” circulera tout de même. Pire : elle alimente d’autant plus l’IA.
Celle-là même qui répond ensuite à nos questions.
“Plus facile, plus rapide, plus séduisant…”
Indéniablement, pour les utilisateurs, les recherches sont autrement plus simples via IA que via Google. Et la frontière entre les deux fond comme neige au soleil. Un phénomène qui semble d’ailleurs aussi inarrêtable que la fonte des glaciers eux-mêmes.
Car, après tout : l’humain en quête de sens – et donc de réponses, demande aux oracles depuis la nuit des temps ce qu’il convient de manger ou non ce soir. Un parallèle remarquablement intelligent fait par Guillaume Peyronnet avec la Pythie de Delphe en février 2024.
La course à la réponse rapide et facile est inarrêtable. Car elle est intrinsèquement liée à la nature humaine. Mais celle du profit facile également.
Quel avenir, alors, dans un monde où les fausses réponses deviennent des drogues ? Où seule compte la satisfaction intellectuelle d’avoir, finalement, bien raison dans son propos ?
N’entrons-nous pas dans un monde où “Rien n’est vrai, tout est permis” ?

(Note : cet article a été entièrement rédigé par un humain.)